MASTOPATHIES
Introduction
Elles sont fréquentes (80 % de l’ensemble des tumeurs du sein sont bénignes) mais toujours inquiétantes en raison de la crainte du cancer qu’il faut absolument éliminer +++.
Il faut par ailleurs dépister les états précurseurs qui, négligés, peuvent aboutir au cancer : ces états caractérisant les «mastopathies à haut risque». En effet, les anatomopathologistes ont identifié de véritables situations frontières entre par exemple :
· L’hyperplasie épithéliale intracanalaire (épithéliose) et le cancer intracanalaire
· La papillomatose intra-ductale et le cancer papillaire infiltrant
· La cicatrice radiaire (Nodule d’Aschoff) et le cancer tubuleux
· L’hyperplasie épithéliale intralobulaire et le cancer lobulaire in situ (ou infiltrant)
L’éradication de ces lésions encore bénignes permet d’assurer une véritable préventive.
Physiopathologie
Le tissu mammaire est un véritable récepteur hormonal sensible avant tout aux stéroïdes ovariens dont le rapport harmonieux au cours du cycle menstruel permet l’eutrophie du sein dans ses composantes nobles : glandes (canaux galactophores faisant suite aux unités sécrétoires), tissu conjonctif de soutien, graisse. Les estrogènes augmentent les mitoses et favorisent le développement des canaux galactophores en même temps qu’il accroissent la perméabilité vasculaire favorisant l’oedème. A l’inverse, la progestérone est antagoniste de ces actions en déterminant la formation des acini à fonction de sécrétion.
On comprend ainsi que le sein est en perpétuel remaniement au cours du cycle menstruel, que tout déséquilibre hormonal doit avoir un retentissement expressif à son niveau est que la meilleure période pour examiner un sein est celle qui suit immédiatement les règles. Seule la grossesse permet un développement harmonieux de la glande mammaire.
Au début de la vie génital l’estrogénie prédominante explique le développement préférentiel des galactophores et du tissu conjonctif. Lorsque les ovulations se sont normalement établies avec une sécrétion en progestérone satisfaisante, le développement des acini s’effectue et l’eutrophie s’installe.
L’hyperestrogénie relative de la préménopause explique l’oedème de tissu conjonctif évoluant vers la sclérose engainant les galactophores à l’origine de la formation des kystes mammaires et de la mastopathie fibrokystique.
A la ménopause, l’atrophie glandulaire s’installe et la graisse envahit le sein.
Différentes variétés de
tumeurs bénignes
Toute
tumeur du sein est le signe d’un processus pathologique qui nécessite de mettre
en oeuvre le triplet diagnostique : clinique, échographique, mammographique,
cytologique +++. Il est le seul capable par la confrontation de ses éléments
d’orienter le diagnostic de la nature de la tumeur, parfois de l’affirmer et
dès que le doute s’installe, d’indiquer l’examen histologique après exérèse de
la tumeur +++.
Adénofibrome
Fréquent, il est l’apanage de la jeune fille ou de
la femme de 20 à 30 ans.
Clinique :
Tuméfaction lisse, ferme, régulière, non adhérente, mobile sur la peau et les plans
profonds, sans adénopathie
satellite suspecte.
Mammographie :
Non indispensable chez la patiente très jeune si la clinique est conforme, elle devient
nécessaire plus tard +++ : opacité dense et régulière, finement cerclée, de même taille
que la tumeur clinique. Parfois des macrocalcifications curvilignes non suspectes.
L’échographie n’apporte rien de plus, montrant une image échogène arrondie, à l’emporte
pièce sans atténuation du faisceau.
Cytoponction :
La tumeur est pleine. La cytologie est riche en cellules d’autant plus que la lésion est plus
jeune et plus active.
Ce triplet diagnostique peut
être moins franc ou la lésion survenir à un âge plus tardif et en cas de doute
seule l’analyse histologique après exérèse permettra de conclure.
Traitement :
Ablation chirurgicale esthétique et contrôle histologique sauf pour les petites lésions qui
peuvent bénéficier d’un traitement progestatif, si elle sont en début d’évolution; l’indication
chirurgicale devient formelle en cas de nodule solide récemment apparu à partir de 35 ans,
même s’il a toutes les apparences d’un adénofibrome.Il faut aussi opérer sans retard les
lésions à développement rapide pouvant correspondre à une tumeur phyllode dont on
connaît le génie récidivant et le risque de dégénérescence sarcomateuse en fonction du
grade histologique.
Kyste
Rarement solitaire, il survient plus volontiers à l’âge de 40 ans, apparaissant parfois très rapidement.
Clinique :
Tuméfaction souvent sensible, régulière, plus ou moins rénitente, sans adhérence, sans
adénopathie suspecte.
Mammographie :
Toujours nécessaire à cet âge. L’image peut être en tout point identique à celle d’un
adénofibrome. Parfois une macrocalcification en coquille d’oeuf. Après évacuation par
cytoponction et insufflation d’air, la kystographie (de moins en moins pratiquée) montre
une paroi lisse en clarté régulière, sans irrégularité ni végétation.
L’échographie :
est ici parlante montrant une lacune parfaitement régulière avec renforcement postérieur,
sans écho intra kystiques, sans végétations.
Cytoponction :
affirme le diagnostic, ramenant un liquide brun jaunâtre parfois citrin. Il faut
soigneusement évacuer la totalité du kyste qui doit disparaître entièrement (sinon suspect)
et envoyer le liquide en cytologie. L’exérèse chirurgicale est réservée aux kystes non
complètements affaissés après ponction ou dont le liquide est sanglant ou qui
s’accompagnent de signes radiologiques et / ou échographiques suspects (densification,
désorganisation de l’architecture glandulaire, microcalcifications au contact ou de
voisinage, végétations intra kystiques).Il faut aussi opérer les kystes récidivants, ou à
cytologie maligne ou simplement suspecte.
Mastopathie sclérokystique
Il s’agit d’une dystrophie du sein associant :
· Des kystes de taille variable, multiples, d’évolution inégale constituant un facteur de risque de cancer du sein d’autant plus qu’ils sont plus volumineux (dystrophie macrokystique).
· Une adénomatose avec prolifération des canaux galactophores et dilatation terminale. Les cellules de l’épithélium des canaux et des lobules se multiplient activement (mastopathie proliférante avec hyperplasie épithéliale).
· Une sclérose plus ou moins intense du conjonctif.
Survenant au même âge que le cancer (40 à 50 ans), les problèmes diagnostiques et thérapeutiques sont fréquents. Ces «mastoses» semblent particulièrement favorisés par le déséquilibre hormonal.
Clinique
La mastodynie souvent associée rend impératif l’examen en fin de période menstruelle +++. Il peut s’agir à la palpation de kystes sensibles et multiples au sein d’une glande multinodulaire (sensation de grenaille de plomb) mais aussi d’une véritable mastopathie tumorale avec placard étendu, irrégulier, prédominant au niveau du quadrant supéro-externe, le plus souvent bilatéral et asymétrique. Il n’y a pas de signe d’adhérence cutanée, souvent une adénopathie satellite sensible.
Mammographie
Opacités en règle multiples, arrondies, nodulaires, de taille variable mais souvent au sein d’une plage dense, plus ou moins opaque de lecture difficile (loupe +++).
Il faut rechercher attentivement des irrégularités, des microcalcifications, une convergence du conjonctif pouvant évoquer un processus malin. L’échographie montre des kystes et recherche des densifications avec aspect en cheminée, des échos intrakystiques suspects, des zones hypervascularisées (couplée au Doppler). Elle peut être particulièrement utile en cas de sein radio-opaque à lecture difficile.
Cystoponction
Des kystes évidents mais aussi microbiopsie en pleine masse solide, n’ayant de valeur que si elle ramène des cellules suspectes ou malignes en l’absence de liquide.
Traitement
Il est d’abord médical. Ponction unique ou multiple, sédatifs nervins et traitement progestatif local et par voie générale de l’insuffisance lutéale en représentent l’essentiel.
L’exérèse chirurgicale avec examen histologique est nécessaire en cas de doute sur la nature bénigne de l’affection :
· triplet diagnostique non concordant;
· persistance d’un placard mastosique malgré le traitement médical ou qui se modifie;
· anxiété de la patiente ou du médecin.
Tumorectomie large, quadrantectomie voire mammectomie sous cutanéo-graisseuse peuvent être proposées selon les cas.
En réalité 3 situations se présentent :
· Mastopathie diffuse à toute la glande, sans facteur de risque et sans microcalcification : Surveillance +++ avec mammographies et échographies à intervalle régulier toujours comparatives.
· Mastopathie diffuse mais avec microcalcifications et facteurs de risque : microbiopsies multiples à l’aiguille voire biopsie chirurgicale large. S’il existe un foyer de microcalcifications, son ablation s’impose après repérage.
· Mastopathie avec placard localisé et facteurs de risque ou qui se modifie : exérèse large réalisant parfois une véritable quadrantectomie.
Cytostatonécrose mammaire
et noyau de mastite chronique
Dans les suites d’un traumatisme du sein ou d’une affection mammaire (allaitement) ils peuvent en tout point évoquer un cancer du sein et, sont donc des diagnostics différentiels uniquement prouvés par la biopsie exérèse qui s’impose dans tous les cas même si l’interrogatoire peut avoir valeur d’orientation.
Ecoulements mamelonnaires
non lactés
Le caractère monoporique et unilatéral oblige à l’exploration.
Ils peuvent être en relation avec :
· une hyperplasie épithéliale
· une galactophorite avec ectasie sécrétante
· une papillomatose intraductale plus ou moins diffuse
· un cancer intracanalaire ou invasif beaucoup plus rarement
Si l’écoulement est sanglant, l’indication chirurgicale ne se discute pas bien que le cancer ne soit retrouvé que dans moins de 10 % des cas.
Si l’écoulement est séreux ou verdâtre, l’examen cytologique du liquide après expression peut orienter mais sans valeur de certitude. Si le liquide est normal, on peut proposer une galactographie complémentaire à la mammographie et à l’échographie. L’ablation du canal intéressé et du tissu adjacent (pyramidectomie) s’impose si la cytologie est douloureuse, s’il existe un nodule sous-jacent, une image mammographique suspecte ou une désorganisation architecturale de l’arbre galactophorique à la galactographie